Si l'auteur court devant, c'est dans les mots qu'il court. Il ne se laisse pas rattraper par cette jouissance, encore dans son ombre, comme s'il la narguait, la provoquait. A mesure, elle grandit et ne le lâche pas. "L'inconscient structuré comme un langage" le fait produire du langage. L'inconscient – désir de langage – désir de verbe était au commencement (de l'humanité), et non le verbe. Pour l'instant il court, dans le langage, son ombre derrière lui. Il se sent créer, il se sent double et uni. Libre d'une liberté prise et reçue, à la fois. Pas d'autre bonheur, ni plus grand. Là-dedans baigne aussi la lectrice, celle qui ne court pas, elle prend le livre en elle. C'est en elle qu'elle le fait courir. Alors, de nouveau, quelque chose en partage vient exister, quelque chose d'inconnu et de si bien connu pourtant, de désiré. Ils s'en délectent. Ils le respirent. Ils ralentissent le mouvement. Pour que rien ne s'...
René Thibaud